Arrivés en soirée à Cayenne à l'aéroport Félix Eboué, célèbre guyanais. On a appris que l'aéroport avait été rebaptisé récemment suite aux pressions des groupes autonomistes pour effacer tous les noms coloniaux. L'histoire et le nom de Félix Eboué laissent un peu sourire quand on sait que Félix Eboué a très peu vécu en Guyane et a été un grand administrateur colonial en Afrique, même s'il est aussi renommé pour avoir jouer un rôle important et plutôt pacificateur pendant la guerre. On parle de mouvements autonomistes et non indépendantistes. Il y a un ressenti lié à l'esclavage et un sentiment de "devoir de reparation" vis à vis des "metros" sans qu'il y est un fort racisme comme il peut plus exister aux Antilles.
Belle rencontre avec Marc notre hôte qui nous a pas mal parlé du fonctionnement ici et des problèmes aussi !
On a été surpris par la présence des Mongs, laotiens descendants des partisans de la France coloniale, recrutés pour la guerre d'Indochine, puis qui ont fui la guerre civile au Laos et qui ont été accueillis pour repeupler la Guyane et créer le village de Cacao où ils assurent aujourd'hui 90 % de la production agricole de Guyane ! (on s'en rend bien compte sur le grand marché de cayenne : les rambutans sorte de litchi poilus présents en masse tout comme les Mongs ou encore les soupes asiatiques que tout le monde déguste..). Surprenant aussi l'omniprésence des chinois qui gèrent tous les commerces de l'épicerie au bazar. Le mélange culturel, immigration du Suriname, haïtienne, brésilienne, les amérindiens, créoles, noir-marrons ou bushiningués (descendants des esclaves africains ayant fui les plantations). Un grand mélange donc ! Et pas mal de soucis de sans papiers, de régularisation, de logement, de vie communautaire... par contre le métissage existe bien et semble évoluer encore.
Quelques impressions sur Cayenne que nous avons parcouru 2 fois rapidement. Petite ville pour une capitale avec ses 60000 habitants. Le samedi, après l'affluence du marché où on peine à sortir de chez soi (il y avait toujours du monde assis devant notre porte attendant le bus...), Cayenne a beaucoup à envier à bourg en Bresse ! Les rues quasi désertes, les maisons sans vitres avec leurs barreaux partout (en même temps il fait chaud), les rues à angle droit avec les maisons un peu destroy, et des allures de ville fantôme (sieste ?). Sans parler du front de mer jonché de troncs et de bois morts issus des mangroves qui cachent la mer par endroit et donne une allure post ouragan ! C'est pourtant un phénomène naturel cyclique tous les 10 ans et qui durent 3 ans le temps qu'une espèce de forêt pousse sur le front de mer et meure. Bizarre ! A tout cela s'ajoutent les travaux en cours pour faire face à la marée du siècle annoncée pour ce we ! Gare aux inondations sur "l'île" de cayenne!
Côté histoire, il faut savoir que le bagne a été installé en Guyane pour repeupler, on vous pase les details des rencontres féminines et mariages forcés .. Petite anecdote, à l'époque le bagne comptait double en Guyane. Pour 6 ans en métropole la peine valait 12 en Guyane ! A l'issu, les bagnards disposaient d'une terre mais l'agriculture difficile les condamnait souvent à chercher du travail et à entrer en concurrence avec les bagnards qui purgeaient leur peine en bossant un peu partout et gratos... il existait même un quartier des libérés au sein même du bagne pour les accueillir!

Côté météo, chaud et humide comme prévu ! De bonnes grosses drasch courtes mais intenses ! Le petit été de mars se fait attendre...

Nous avons rapidement rencontré Céline qui entre 1001 occupations et soucis de dégâts des eaux a su trouver du temps à nous consacrer et nous aider à nous organiser pour rejoindre le village Favard avec lequel elle developpe tout juste un projet de tourisme rural communautaire. Mais aussi pour une excursion au marais de Kaw le tout en plein PNR de Guyane.
Taxi-co au départ de Cayenne et nous voilà partis direction Roura à 6 puis 10 dans le mini van... on poursuit ensuite le transport co avec plus original. La pirogue scolaire ! Nous voilà embarqués avec une vingtaine d'enfants qui comme partout crient, jouent, jetent des trucs et s'étonnent. ..notamment des lunettes de Thomas et plus encore de ses yeux "violets" ! Viens ensuite la question classique : pourquoi ? ... parce que mon père a les yeux bleus et ma mère les yeux marrons. Explication acceptée ! Après une bonne saucée en pirogue on decouvre le village. Les jeunes comme nous qui jouent aux petits chevaux, les enfants qui jouent direct au foot dans la boue et plus sympa qui se tirent sur une chambre à air bien gonflée dans les flaques et la boue, on aperçoit aussi le grand écran tv dans certaines maisons sur pilotis.... On découvre grâce à jocelin notre piroguier un bout d'histoire du village habité principlament par les amérindiens Palikurs. Fondé vers 1964 par ses grands parents quittant la région de Saint Georges en pirogue par la mer pour fuire les maladies et se rapprocher de Cayenne. Avant d'être ce village de 150 âmes c'était un point de transit entre le premier village installé un peu plus loin et Cayenne. Pour ne pas trop nous dépayser on apprend que Jocelin est le fils du capitaine, espèce de maire... il y a aussi bien sur un chaman. Le village vit principalement de la pêche, de l'agriculture, un peu de la chasse et bientôt du tourisme avec une toute jeune association : Walyku. Hamacs installés dans le carbet au bord de l'eau (sorte de préau), c'est parti pour une bonne nuit au doux bruit des crapauds et cigales qui jouent de la scie circulaire ! Départ à 7h30 pour 4h de randos avec notre guide Mateus à la découverte de la forêt secondaire puis primaire. Culture du manioc, plantes et arbres medicinaux qu'il connait pas mal étant le fils d'un chaman, trace de jaguar, de tapir, de tatou, bruit de singe et de toucan, tarentule et serpent sur le chemin...il ne faut pas trop toucher n'importe où... même les grenouilles bizarres se cachent dans la fente des petits troncs. Majestueux et impressionnant de diversité ! À peine arrivés sur la route, auto-stop direction Kaw à 50km situé au milieu d'un immense marais au bout de la route en impasse... dur dur le stop sur cette route empruntée seulement par de rares touristes et quelques prestataires d'excursions. Chance au rdv ! On arrive même à voir une bande de singe saimiri avant de faire de la pirogue-stop et d'être à l'heure pour notre balade à 15h avec le seul prestataire local qui nous promène à la cool dans les marais pour observer les oiseaux. Le village de Kaw est dévasté et se vide de ses habitants rapidement... plus que 40 aujourd'hui et encore (150 il y a 2 ans ) ! pas de boulot, plus de jeunes, même le tourisme (3e site de guyane quand même ) ne rapporte pas bien au village car tenus principalement par des prestataires extérieurs. La journée se termine par une sortie nocturne caïman ! Et Thomas a même péché à la main un caïman rouge bien nerveux ! Visage pâle mais fier !
Retour le lendemain en stop chez Céline et repos pour préparer la suite de la route vers le Brésil, aventure en soi à ce qu'il paraît !